La CNIH (commission nationale indépendante de reconnaissance et de réparation des préjudices subis par les Harkis, les autres personnes rapatriées d’Algérie anciennement de statut civil de droit local et les membres de leurs familles) a remis son rapport annuel, lundi 15 mai, à la Première Ministre.

Ce premier rapport se concentre sur l’ajout de lieux ne figurant pas dans la liste du décret pris après la loi du 23 février 2022. Le rapport de 183 pages comprend 122 pages d’annexes, consacrées à l’analyse détaillée des 87 lieux expertisées par la commission. 45 lieux seront ajoutés. Une trentaine seront étudiés ou complétés cette année.


Ajouter 45 lieux revient à ouvrir droit à réparation pour plusieurs milliers de personnes. AJIR a sollicité ses adhérents pour signaler des lieux et pour rechercher des documents afin de faire gagner du temps à la commission. AJIR se félicite de l’ajout de ces lieux.


Mais, hormis l’ajout de lieux – important, on le redit – le rapport de la CNIH, s’avère décevant car il ne propose rien sur toutes les autres insuffisances ou injustices qui restent à corriger et pour lesquelles nous avions produit et remis un rapport de 70 pages avec des propositions argumentées.


On sait que la commission ne peut pas d’elle-même prendre des décisions qui sortiraient du cadre de la loi votée, comme augmenter le montant modique de la réparation calqué sur l’arrêt Tamazount (2018), ni accepter les dossiers d’autres populations écartées par la loi, injustice qu’AJIR et d’autres associations ont toujours dénoncée. (Voir notre rapport à l’issue de la journée au Sénat ici


Mais cette commission a le « pouvoir de proposer, au vu de ses travaux, toute mesure de reconnaissance et de réparation » pour les personnes concernées. C’est dans sa mission de faire des propositions au Gouvernement pour compléter la loi ou l’améliorer. Elle peut aussi proposer des modifications qui ne nécessitent pas une nouvelle loi et pour lesquelles un décret suffit comme pour l’ajout de lieux ou l’uniformisation de l’allocation pour les veuves.


Donc, compte tenu de sa mission et de la qualité des membres de la CNIH, les Harkis étaient en droit d’attendre des propositions claires et argumentées sur de nombreux points parmi lesquels :
• Le cas des Harkis non passés par les lieux listés dans les décrets d’application dont la singularité devait être examinée au cas par cas, conformément au courrier (mai 2022) de Geneviève Darrieussecq, ancienne ministre des anciens combattants suite à une intervention d’AJIR auprès du Président de la République. (cf document sur site AJIR)
• La discrimination choquante entre les veuves pour l’allocation de reconnaissance selon que leur mari est décédé avant ou après 2015, ou avant 2005.
• La suppression de la date limite du 31 décembre 1975 alors que la Commission reconnait elle-même que de nombreuses familles sont restées dans les lieux de relégation après les années 1980.
• La prolongation du Fonds Social (2018 à 2022) pour l’ouvrir aux personnes des 45 lieux ajoutés.
• La création d’une fondation dédiée à la mémoire et l’histoire des Harkis et susceptible de prendre la relève des politiques publiques à propos des actions mémorielles et culturelles dont le besoin est de plus en plus criant.

Ces demandes, pourtant qualifiées dans ce rapport d’attentes fortes, n’ont fait l’objet par la commission d’aucune proposition concrète au gouvernement pour poursuivre le travail de réparation engagé.


On peut parfaitement comprendre que la commission se soit fixée des priorités et se soit focalisée, durant cette première année de fonctionnement, sur l’ajout de lieux et structures, ce qui représente indéniablement un travail de recherche et d’analyse important et chronophage. Néanmoins, nous pensons qu’il est impératif pour l’année à venir que la commission prenne en compte les autres attentes légitimes exprimées et travaille en vraie concertation avec les associations réellement nationales.


Quant à la polémique lancée au sujet de l’annexe 4 du rapport, tous ceux qui ont pris le temps de lire l’article ont compris que la demande de démission n’a aucun fondement sérieux. Contrairement à ce qui est prétendu, l’auteure, Directrice de recherche au CNRS, n’insulte pas les harkis mais dit la manière dont les harkis sont hélas encore perçus en Algérie par le pouvoir politique qui refuse toute recherche historique objective.


Si nous avions été convaincus que cet article insultait les Harkis, AJIR aurait réagi (comme son Président l’a fait à la télévision le 17 juin 2000 après l’insulte de Boutéflika le 16 juin ou contre les propos de Georges Frêche). Ce n’est pas le cas ici : donc AJIR ne cautionne aucunement cette pétition.


Mais pour éviter de mauvaises lectures et risquer involontairement de blesser, cette annexe pourrait être soit enlevée de la version numérique du rapport, soit assortie d’un avertissement précisant qu’il s’agit bien de la perception des politiques algériens et non de l’auteure de l’article ni de la commission.


Cette polémique stérile, qui n’apportera rien, ne doit surtout pas masquer le fond du rapport, avec ses avancées et ses lacunes et donc le travail qui reste à faire.


Les membres de la commission sont tous compétents et font preuve de bonne volonté. Ils vont sur le terrain, s’informent et écoutent. Le rapport dit qu’ils ont entendu les souffrances endurées. Cependant, nous n’attendons pas de la compassion mais des propositions de juste réparation.


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Texte rédigé le 24 mai 2023 par Said Balah, Secrétaire national et Président d’association, Mohamed Haddouche, Trésorier et Président du FMH et Mohand Hamoumou, Président national, pour le conseil national d’AJIR après réunion en visio et unanimité sur la teneur de ce message.


AJIR pour les Harkis a été créée en 1998. Elle a eu pour président national successivement Mohand Hamoumou,
Mohamed Haddouche, Said Mérabti, Jacques Alim et depuis 2021 Mohand Hamoumou.
Secrétaire national : Said Balah (45), Trésorier national : Mohamed Haddouche (76)
Vice Président-e-s : Ali Amrane (06) Hafida Chabi (67) Mohamed Baziz (76) Fatiha Foudi (24)
Délégué-e-s régions : Nora Forté (Paca) ; Ghalia Thami (Occitanie) ; Marie Gougache (Ile de France) ; Colette Pétrod (Auvergne Rhône Alpes) ; Fatima Laouar (Grand Est) ; Hamid Khemache (Nouvelle Aquitaine) ; Abdelaziz Henine (Centre Val de Loire) ; Kamel Atéména (Nord) ; Amar Taher (Bourgogne Franche-Comté).


AJIR compte une quarantaine de président-e-s d’associations et des adhérents dans 53 départements…


9 septembre 2023 : assemblée générale nationale à Riom (Puy de Dôme)
10 juin 2023 : Hommage au Général Meyer, ancien Président d’Honneur d’AJIR à Villefort (Lozère).